Le folklore local le long de l’EuroVelo 19 – La Meuse à Vélo
France
L’histoire de l’EuroVelo 19 commence en Haute-Marne, France, là où la Meuse prend sa source avant de couler vers le nord. Ne vous laissez pas tromper par l’ambiance paisible : les légendes d’ici sont pleines de drames. Près de Balesmes-sur-Marne se trouve la grotte de Sabinus, un rebelle gaulois qui se battit contre l’occupation romaine et se cacha ici pendant neuf ans, avant d’être capturé et torturé. La tradition populaire situe le refuge souterrain de Sabinus dans cette grotte. Cependant, aucune preuve archéologique ne vient confirmer cette localisation ; il vous faudra la visiter pour voir si vous ressentez sa présence.
En pédalant vers les Ardennes, le paysage devient plus sauvage… et les récits aussi. L’une des plus marquantes est celle des Dames de Meuse. Selon la légende, en l’an 1080, le seigneur de Hierges eut trois fils qui épousèrent les trois filles du seigneur de Rethel. Tandis que les époux partaient guerroyer en Terre sainte, les femmes trahirent leurs vœux. Le jour où Jérusalem tomba, elles furent changées en trois grands rochers dominant la rivière. Aujourd’hui, ces « dames » de pierre se dressent toujours, hautes de 400 mètres. Si vous souhaitez faire une pause dans votre voyage à vélo, un sentier de randonnée de 14 km, le circuit des Dames de Meuse, offre des vues inoubliables sur la vallée.
Belgique
, offrant plus de 100 km de cyclisme mêlant calme fluvial et récits légendaires. Les Ardennes belges sont aussi enchanteresses que leurs voisines françaises.
À Dinant, la légende raconte que les quatre fils d’un seigneur nommé Aymon fuirent la cour de Charlemagne sur le dos de leur cheval Bayard. Bayard traversa vallées et rivières, portant les quatre frères, pour échapper à l’Empereur. Lorsque Charlemagne crut enfin les tenir, Bayard frappa le rocher de ses sabots et sauta par-dessus la Meuse, vers la liberté. Le grand rocher se fendit sous la force du bond. Le célèbre Rocher Bayard serait l’empreinte de ce saut légendaire.
En entrant dans le Limbourg, vous sentirez peut-être l’atmosphère se charger de mystère. Cette province s’est forgé une réputation malicieuse grâce aux Bokkenrijders. Au XVIIIᵉ siècle, ces redoutés bandits furent accusés de voler la nuit en chevauchant des boucs après avoir signé des pactes avec le diable. En continuant vers le nord, le ton s’adoucit à Stokkem, où des artisans locaux tressent encore les roseaux de la Meuse pour en faire des paniers — transformant la nature en artisanat.
Le commerce de contrebande prospérait autrefois ici : café, beurre et tabac passaient la frontière à la faveur de la nuit. Aujourd’hui, le festival Smokkelmarkt perpétue cette histoire un peu frondeuse, mais de manière bien plus conviviale.
Et puis viennent les schutterijen, confréries de tireurs d’élite vieilles de plusieurs siècles, qui défilent en uniforme historique. Si vous avez la chance d’arriver pendant le Oud Limburgs Schuttersfeest, c’est comme entrer à vélo dans un carnaval où le Moyen Âge rencontre la modernité : la preuve que les traditions du Limbourg belge sont bien vivantes ! Le tronçon belge de la Route de la Meuse est peut-être court, mais il regorge de légendes qui resteront longtemps dans vos pensées.
Pays-Bas
, la Route de la Meuse vous emmène dans le sud du Limbourg. Ici, paysages spectaculaires et folklore singulier se rencontrent. De petites créatures appelées Auvermennekes vivaient dans et autour du château de Stein. Elles habitaient les caves secrètes du château et pouvaient aussi se rendre invisibles. La légende dit qu’elles se reposaient le jour, mais la nuit venue, elles se rendaient dans les maisons pour accomplir les tâches ménagères : nettoyer, laver le linge ou repeindre les murs. Qui sait ? Peut-être gonfleront-elles les pneus de votre vélo !
Les découvertes archéologiques rappellent que cette vallée a vu passer des Romains, des Vikings, des contrebandiers… et désormais, vous, à vélo. Et si vous voulez ressentir la vie à l’époque de la contrebande, il existe même un escape game où vous pouvez littéralement vous glisser dans la peau d’un contrebandier !
En parcourant le Limbourg central et septentrional, vous croiserez des légendes aussi colorées que les villages eux-mêmes. À Beesel, les habitants organisent tous les sept ans un spectacle de combat contre le dragon pour célébrer la victoire de Saint Georges, avec feux et musique. Roermond garde un souvenir plus sombre, marqué par les procès de sorcières, tandis qu’à Weert, Antje van de Statie a rendu la ville célèbre avec sa fameuse tarte de Weert. Sa statue à la gare perpétue son souvenir, et la tarte authentique, toujours cuite comme à son époque, remplira votre estomac pour continuer quelques kilomètres de plus.
Plus loin, la route pénètre dans le Noord-Brabant, où le Land van Cuijk n’est pas en reste côté légendes étranges. On y raconte qu’un soldat romain perdit une sandale dans la Meuse après l’apparition d’un fantôme qui le mit en garde contre une attaque. L’autre sandale est visible aujourd’hui au musée de Cuijk. Une autre histoire parle du Duvelsklökske de Sambeek, une cloche d’église disparue dans les buissons, mais que l’on entend encore sonner les nuits d’orage. Si vous êtes (mal)chanceux, vous l’entendrez peut-être pendant votre séjour !
En pédalant vers Voorne-Putten et en arrivant à Brielle, vous roulez littéralement là où les Pays-Bas sont nés. Le 1er avril 1572, les Watergeuzen, ou « mendians de la mer », reprirent le port des mains espagnoles. Ce jour-là marqua le début de la lutte pour l’indépendance des Pays-Bas. Aujourd’hui, les rues pavées et les plus de 400 monuments murmurent encore cette histoire, que vous exploriez le Historisch Museum Den Briel ou que vous assistiez à la reconstitution du 1er avril (oui, avec costumes, canons et cris de « Vive les Gueux ! »). Même lors d’une journée tranquille, pédaler le long du port de Brielle donne l’impression de rouler à travers l’histoire — une fin parfaite avant que la Meuse ne vous conduise jusqu’à la mer.
Un fleuve d’histoires
Quelle meilleure façon de découvrir les villes et les régions bordant l’EuroVelo 19 – Route de la Meuse que par leurs légendes? Ces récits ne sont pas de simples mythes anciens : ce sont des traditions vivantes, entretenues par les festivals locaux, les musées du folklore et les célébrations populaires. Alors en selle : les histoires du fleuve vous attendent!
Article de Mariona Garcia-Arbós i Mata